LA FAUTE GRAVE  
   
1. DÉFINITION  
Il n'existe pas de définition autre que celle élaborée lors du contrôle des décisions déférées à la Cour de cassation ;
la jurisprudence considère donc que la faute grave résulte...
 
d'un fait ou d'un ensemble de faits  
imputables au salarié  
et constituant une violation des obligations contractuelles dont l'importance rend impossible le maintien de la relation dans l'entreprise  
pendant la durée du préavis.  
   
2. LA PROCÉDURE  
a.. Licenciements tardifs  
I) L'employeur peut avoir besoin d'un délai pour apprécier le degré de gravité des faits...
En conséquence, la durée du temps nécessaire peut varier en raison du déroulement de l'enquête.
 

II) sauf lorsqu'il a connaissance des circonstances et des conséquences
Le maintien du salarié n'est pas impossible lorsque l'employeur a attendu plus de deux mois, après la date où il avait appris les faits, pour prononcer le licenciement.

Il résulte des dispositions de l'article L.122-44 que le juge a obligation de se prononcer sur la prescription de faits fautifs, lorsque celle-ci est invoquée.

 
b. mise a pied conservatoire  
I) Le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la procédure...
ne prive pas l'employeur du droit d'invoquer l'existence d'une faute grave.
 
II) Le prononcé d'une mise à pied conservatoire...
constitue l'engagement de poursuites disciplinaires et interrompt la prescription des faits susceptibles d'être invoqués.
 
   
3. LE PRÉAVIS  
Le maintien de la rémunération pendant le délai-congé ne prive pas du droit d'invoquer la faute grave.  
   
4. LE CONTRÔLE DE LA GRAVITE  
a. QUALIFICATION PAR LE JUGE  
La preuve de la faute grave incombe à l'employeur.  
Constitue un mode de preuve illicite l'utilisation d'un mode de contrôle mis en œuvre par l'employeur sans l'avoir préalablement porté à la connaissance du personnel.  
Le juge doit s 'en tenir aux seuls griefs énoncés, mais il n'est pas tenu par la qualification donnée par l'employeur dans la lettre de licenciement ou par celle résultant éventuellement du règlement intérieur ;  
le pouvoir d'appréciation souveraine implique que le juge, constatant l'absence d'un degré de gravité, se prononce tout de même sur l'existence d'une cause réelle et sérieuse !  
Une faute grave ne nécessite pas l'existence d'un préjudice subi par l'employeur.  
En cas de doute, celui-ci bénéficie au salarié !  
b. JURISPRUDENCE  
I) Ne constitue pas une faute grave :  
l'incompétence, l'insuffisance de rendement,
la perte de confiance,
le cumul irrégulier d'emplois,
un motif étranger au contrat de travail,
un départ inopiné résultant d'une raison médicale avérée,
un jour de retard à l'issue des congés payés ou d'une maladie,
deux jours de retard après le décès du père,
ne pas avoir avisé l'employeur d'un accident de la circulation,
envisager de créer sa propre entreprise sans avoir commis d'actes de concurrence,
le lien personnel avec le dirigeant d'une autre entreprise.
 
II) Constitue une faute grave  
la réduction volontaire de l'activité ou la non-conformité aux directives explicites concernant les modalités d'exécution de la tâche,
le dénigrement des décisions de gestion ou de stratégie commerciale,
l'insoumission à une sanction disciplinaire justifiée et proportionnée au grief,
l'activité dissimulée, à caractère professionnel, pendant un arrêt maladie,
passer outre à un refus d'autorisation d'absence,
la présentation d'un document falsifié (pour justifier d'une absence, pour obtenir des remboursements indus ou portant sur un disque de contrôle tachygraphique),
un remplacement par un collègue non-qualifié,
les propos racistes ou insultants et tous actes violents,
la consommation d'alcool sur le lieu de travail,
la divulgation d'informations confidentielles,
le détournement de clientèle ou de matériel, le travail personnel pendant les heures de travail,
l'inexécution d'une clause contractuelle (mobilité),
le trouble pour l'entreprise d'un fait relevant de la vie privée (vol à l'extérieur de la société, attitude équivoque sur mineure).
 
   
III) Peuvent avoir une incidence les éléments suivants :  
   
l'âge, l'ancienneté,
les usages professionnels (langage coutumier, usage du téléphone ou emprunt d'un véhicule pour déménager),
la provocation par l'employeur,
l'inexistence de sanctions antérieures ou la répétitivité des manquements.
 
5. L'INCIDENCE DES DÉCISIONS PÉNALES  
Le principe de l'autorité de la chose jugée empêche le juge civil de méconnaître ce qui a été décidée par la juridiction répressive ;  
ceci n'est applicable qu'aux décisions :  
qui sont définitives et statuent sur le fond,  
ce qui n'est pas le cas...  
d'une décision administrative de classement sans suite,  
ou d'un non-lieu à poursuite, concernant à l'évidence un fait étranger à la controverse entamée devant le juge du contrat de travail.  
   
6. RUPTURE du CONTRAT d'APPRENTISSAGE en MÉCONNAISSANCE de la LOI  
a. CONDITIONS LÉGALES DE LA RÉSILIATION  
Une fois conclu et exécuté pendant un certain laps de temps, le contrat d'apprentissage est soumis à des conditions de résiliation assez strictes :  
en application de l'article L.117-17 du Code du travail, la résiliation du contrat d'apprentissage exécuté depuis plus de deux mois ne peut intervenir que…  
sur accord exprès et bilatéral des partie  
ou, à défaut, être prononcée par le conseil de prud'hommes  
¨ en cas de faute grave  
¨ ou de manquements répétés de l'une des parties à ses obligations  
¨ ou en raison de l'inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer.  
La Cour de cassation avait déjà eu l'occasion de reconnaître aux dispositions relatives à la résiliation du contrat d'apprentissage un caractère d'ordre public, déniant à l'employeur, une fois passés les deux premiers mois, tout droit de rompre le contrat de travail d'un apprenti, quel que soit le bien-fondé des motifs invoqués. Cass. Soc. 09/05/90  
L'employeur a, en revanche, la possibilité, si la faute commise par l'apprenti le justifie, de prononcer sa mise à pied dans l'attente de la décision à intervenir, c'est-à-dire le prononcé de la résiliation judiciaire. Cass. Soc. 23/03/89 et 30/03/94  
b. CONSÉQUENCES DE LEUR MÉCONNAISSANCE  
Si, malgré les dispositions de ce texte, l'employeur rompt de sa propre initiative le contrat d'apprentissage, la rupture du contrat sera dépourvue de tout effet et l'employeur sera tenu, sauf s'il a prononcé une mise à pied, de payer les salaires jusqu'au jour où le conseil de prud'hommes aura statué (ou jusqu'à la date de fin du contrat) ;  
en plus, si le contrat est rompu aux torts de l'employeur, celui-ci sera condamné à payer à l'apprenti une indemnité réparant le préjudice subi du fait de la rupture anticipée du contrat.
Cass. Soc. 04/05/99, Lefebvre c/Sté Gouny et fils pourvoi n° 97-40.049 arrêt n° 1908 P
 
De plus, si le juge ainsi saisi prononce la résiliation du contrat aux torts de l'employeur, il doit le condamner à payer une indemnité réparant le préjudice subi par l'apprenti du fait de la rupture anticipée du contrat ;  
on peut deviner que cette indemnité sera le plus souvent proportionnelle au montant des salaires qui auraient été payés si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme.